Le 10 février 2017

Par Jean Muller

1) L’attention

L’enjeu pour le « passeur de connaissances », c’est d’attirer l’attention, et de la canaliser.

Cela suppose d’éviter la dispersion, et nécessite de se consacrer à une tâche unique. Les sciences cognitives posent en ce sens la question de la discipline, et des inégalités entre milieux sociaux en termes d’acquisition de comportements facilitant les apprentissages.

2) L’engagement actif

Un organisme passif n’apprend pas, il faut qu’il y ait mobilisation pour qu’il y ait apprentissage. Cela suppose aussi de tester la fiabilité d’une connaissance. Et rendre les conditions d’apprentissage (raisonnablement) plus difficiles va paradoxalement aboutir à un surcroît d’engagement et un effort cognitif, synonyme de meilleure attention.

3) Le retour d’information

L’idée, c’est que l’on apprend de ses erreurs. Ainsi, le cerveau fonctionne par itérations (prédiction, feedback, correction, nouvelle prédiction), ce qui veut dire que l’erreur est normale, inévitable, et fertile. Cela implique qu’elle ne soit pas trop sanctionnée, dans la mesure où le stress est un inhibiteur d’apprentissage, le sentiment d’impuissance pouvant même annihiler tout effort ultérieur. A l’inverse, la motivation naît de l’encouragement, et de la valorisation.

4) Consolider l’acquis

Le phénomène d’automatisation est crucial, c’est lui qui permet de passer de l’explicite à l’implicite : autrement dit, si on prend l’exemple d’un enfant qui apprend à lire, les débuts sont difficiles, compte tenu de la quantité d’éléments à retenir. Mais le phénomène d’automatisation permet de dépasser le décodage, et se concentrer sur le sens du texte.

les quatre piliers de l'apprentissageLe rôle du sommeil

Le cerveau travaille pendant le sommeil, ce qui permet la consolidation des apprentissages. Il met en ordre les nouveautés, détecte les régularités, établit des généralisations…

Ainsi, les résultats des sciences cognitives sont clairs : répartition d’un apprentissage sur plusieurs jours (ce qui favorise la mémoire à long terme). De ce point de vue, la semaine de quatre jours est une erreur. L’utilisation de serious games pourraient jouer un rôle important, en particulier dans les familles défavorisées, en permettant une stimulation de la cognition tous les jours.

Dans la mesure où les différentes zones du cerveau et les différentes intelligences qui en découlent ne se développent pas au détriment les unes des autres. Autrement dit, c’est le temps consacré aux apprentissages qui comptent.

L’article de Stanislas Dehaene dans ParisTechReview

Dans son article, l’auteur rappelle que c’est la plasticité cérébrale qui permet l’apprentissage. La technologie de l’IRM a montré par exemple que la lecture sollicite toujours la même petite zone de l’hémisphère gauche. Et de façon surprenante, cette zone recycle un « algorithme » préexistant, celui de la reconnaissance des visages. Ce qui explique comment fonctionne l’apprentissage de la lecture : l’enfant va reconnaître les segments, les lettres, quand il mobilise cet algorithme. Des tests d’apprentissage d’une langue imaginaire ont d’ailleurs montré que l’apprentissage de l’alphabet donnait des résultats supérieurs à une méthode de reconnaissance par bloc.

Mais ce que montre également les neurosciences, c’est qu’il vaut mieux répartir un apprentissage par petites périodes sur une durée plus longue que l’inverse. Avec l’imagerie médicale, on a aussi montré que l’apprentissage était optimal quand il y avait alternance d’acquisitions de connaissance et tests répétés : ces tests permettent de savoir si on a compris ou pas, et d’identifier ce qui pose encore problème, pour apprendre vraiment.